Apparat est, avec Marco Haas aka
T.Raumschiere, le boss du label allemand Shitkatapult. Il nous avait séduit en 2004 avec l'album
Duplex, véritable bijou d'electronica sensible. Il débute 2005 en fière forme avec un maxi plus physique :
Can't computerize it.
Can't computerize it fait l'objet d'un stretching intensif. Sa base, dans l'air du temps, celui d'un entre-deux, entre warm-up et peak time, entre electro-tech et syncope electro hip-hop, est bousculée dans des dérapages incessants. Le kick appuyé d'une basse répétitive, insistante, et d'une guitare électrique d'un traitement tout à fait similaire à celles du
Trashscapes d'
Ellen Allien (logique, il a conçu
Berlinette avec elle et les
Smash TV), pourrait suffire. Mais le producteur esquive la linéarité par des coups de butoir joyeusement pervers, désarçonne le sample vocal par des scratches incessants, et remodèle ainsi les textures dans l'invention d'un groove instable et jouissif.
Une fois la méthode exposée, il ne reste plus qu'à la décliner : voici
Hot, avec plus en avant les échos mélancoliques, très allemands, qui guettaient déjà sur la track précédente. Rythme et basse profitent de ce que l'esprit plane dans ces échos pour suivre des décalages plus prononcés encore.
Cheap Thrills est peut-être la synthèse la plus efficace, et la plus représentative de ce son particulier. Rythmique et basse commencent par prendre en charge vos jambes, puis de nouvelles sonorités lumineuses font monter la tension, la canalisent, mais jamais ne la libèrent. C'est un electro hip-hop progressif, qui ne s'arrête pas de monter ; le DJ aura à capitaliser cette tension accumulée du danseur, utiliser cette track qui joue sur la limite, sur la promesse qui tient en haleine.
Funk is something else : en effet, "le funk est autre chose". Mais
Apparat est ici groovy, voire chaleureux, à sa façon toute germanique d'un dancefloor intello. Ce qui constitue un paradoxe en apparence seulement, puisque s'il n'a pas su "computerizer" le funk, il aura "funkisé" ses machines. Si vous étiez réticents au côté pop de
Berlinette, en voici en quelque sorte la version tracky, plus rude, plus minimale, une electro-tech aux pulsations solides et aux gimmicks planants.
Chroniqué par
Guillaume
le 02/02/2005