Qod Lab 1, réunion d'activistes de Laval, est avant tout un objet intriguant. Cela dès la lecture du tracklisting : les pseudonymes des artistes en présence jouent sur la typographie et apparaissent comme des codes informatiques, ces formules ésotériques modernes, ces sésames d'une communauté d'initiés - les prog-amateurs. Et les contenus sonores réunis ici sont à l'image de cette théologie numérique. Equations de bits et de flux mutants, influences urbaines et cyberculturelles traversent les hallucinations sonores de ceux qu'on imagine comme des men-machines, passant leurs nuits sous psychotropes devant des leds rouges et vertes clignotantes et enregistrant leurs délires labyrinthiques. Ne riez pas, l'effet est là, fascinant.
La chapelle où sont célébrées les ondes pirates, c'est le studio Palindrome. Tous les sacrilèges y sont permis. Les processions (dark) ambient, parasitées (
mha), noisy (
r-max) ou pas (
atad, et
narcissiq par
!diosynqratiq). Les sacrifices de drones comme les détournements de signaux (
dj trankil is not a dj).
Un lieu où sont donnés des récitals d'electronica très réussis, sur une base de déconstruction syllabique avec
proto poem de
sqkeezoïd partners companee (paradoxalement pas si lyrique) et
mek+u3 dans un registre plus mélodique, registre approfondi avec talent par l'apaisé
Dj Zukry.
Un lieu où
askwell peut mettre l'assemblée à genoux, commençant sur par rythme abstract et sacré choeur contemplatif, brusquant ensuite son morceau, pour mieux fuir vers un breakbeat urgent, qui laisse l'auditeur exsangue. Plus loin, mention spéciale à
Dj Klectiq (auteur de la piste cachée
Stupid Policeman au tiers du parcours) et
vled borek dans un esprit noctambule similaire, et tout aussi obsédant. Obsession et perte des repères à nouveau sur
orbit train, travelling electro-dub par
zaruts. La chapelle y devient cathédrale dans une atmosphère à rapprocher de la paranoïa entretenue à la skunk de Wordsound Recordings.
A l'heure où l'avant-garde est à la portée de tous, où le home-studio n'a jamais été aussi glamour, Qod est une secte fascinante qui utilise les données binaires pour fuir l'orthodoxie numérique. L'une de ces ouvertures passe par la
Licence Art Libre, application juridique probante aux esthetiques post-modernes des musiques électroniques (techniques de cut-up, sampling et remix), et ici appliquée à toutes les productions. Auditeurs avertis, c'est-à-dire fidèles en puissance, un nouveau culte n'attend que votre adhésion pour commencer.
Chroniqué par
Guillaume
le 15/12/2004