Deux ans se sont écoulés depuis la sortie du chef d’œuvre de
Mùm :
Finally we are no one, et revoici le groupe à présent réduit au trio Gunnar Örn Tynes, Örvar Thóreyjarson Smárason et Kristín Anna Valtysdóttir, après que Gyða Valtýsdóttir, sa jumelle, ait choisi de les quitter pour se consacrer à l’art.
Que reste-t’il alors de nos amours pour
Mùm, avec cette reformation ? Toujours ces paysages enneigés et organiques, ces plaines balayées par un vent électro-acoustique, cette voix enfantine de Kristin qui cette fois-ci est plus identifiable, moins parsemée, plus incarnée que sur le précédent opus. Cette mise en avant est peut-être due au départ de sa sœur, mais sa voix n’en est pourtant que plus fragile, comme si elle devait user toutes ses forces pour expulser l’air nécessaire à faire vibrer ses cordes vocales, à la limite de la cassure. Pas complexée par le son enfantin de sa voix, Kristin en rajoute et on en redemande, tant elle colle à l’identité forgée au cours de leurs albums et tant elle met en avant une humanité plus présente dans
Summer make Good que dans aucun autre album de
Mùm auparavant.
Pour composer ce dernier opus, le trio s’est enfermé pendant plusieurs semaines dans un ancien phare perdu, à trois heures de marche à travers la montagne du point d’accès à la mer le plus proche, sachant qu’il fallait prendre le bateau pour se réapprovisionner. C’est de ce décor de roches désertiques, balayées par un vent glacial qu'ils se sont inspiré et c’est sûrement ce que représente la couverture de l’album : un intérieur chauffé par un faible feu de bois, qu’on devine à peine voire pas du tout, et un trou dans le mur par lequel on aperçoit le paysage désertique islandais et par où s’engouffre le vent et ses mélodies glacées. Par cette description, vous êtes d’emblée dans l’album et ses sons de bois vermoulu qui craque, les souffles , les gouttes d’eau...
La surprise, avec ce nouveau voyage dans l’Islande la plus rigoureuse et la plus reculée, c’est la facture du son, plus « acoustique » ou « electro-acoustique ». En effet, ils sont ensuite partis enregistrer sur une autre terre de la même région, dans une ancienne station météorologique où, cette fois, il y avait l’eau courante. C’est là qu’ils ont choisi de changer leur méthode d’enregistrement et de confier les sons acoustiques joués à d’anciens amplis vintage et autres baffles de vieux gramophones, et donc faire voler en éclat le principal reproche produit à l’encontre du précédent album : un mixage trop « électronique », qui ne met pas en valeur les nombreux instruments employés. Dans
Summer make Good, vous entendrez de tous leur corps et de toute leur pouvoir acoustique les banjos, glockenspiel, violons, accordéons... Et pourrez alors deviner l’incroyable expérience de rencontre entre électronique et acoustique que représente leurs performances live.
Après le relativement plus facile d’accès :
Finally we are no one, encore un album des islandais qui ne s’ouvre pas à vous si facilement, malgré sa douceur, et qui nécessitera plusieurs écoutes pour saisir les multitudes de détails, l’inusable inventivité des rythmiques batterie/sons. Quand bien même vous réussirez à mieux saisir et mieux faire votre cette musique, je promet que chaque nouvelle écoute de
Summer make Good apportera son lot de richesses insoupçonnées, me laissant présager que le mystère de
Mùm est loin d’être résolu...
Chroniqué par
dClem
le 13/04/2004